Après une courte halte en
centre-ville devant la Fresque de l'Afrique que je ne détaillerai
pas ici (cf « Un dimanche sur la Corniche »), le minibus
nous a transportés jusqu'au Musée Galerie du Bassin du Congo, situé
un peu après la gare ferroviaire.
Fondé en 2008 par le quotidien Les
Dépêches de Brazzaville (présenté
comme le premier groupe de presse d'Afrique centrale), le Musée se
trouve dans le même bâtiment que le journal.
Empruntant un long couloir vitré
pour accéder à la Galerie, l'occasion est propice à une
observation attentive des constructions situées à l'arrière des
locaux. Mon attention se porte alors sur un immeuble de quatre étages
en piteux état et a priori abandonné.
Il est en fait criblé d'impacts de
balles et calciné en maints endroits. Le bâtiment témoigne ainsi
des événements violents qui secouèrent la capitale pendant la
guerre civile qui marqua le pays en 1997-1999 (conflit qui fit
environ 10 000 morts).
Le Musée Galerie accueille des
œuvres diverses de plusieurs pays (ex : Angola, Cameroun,
République Centrafricaine, RDC) qui constituent le Bassin du Congo
(deuxième plus grand bassin fluvial au monde après celui de
l'Amazone).
On trouve ainsi des tableaux,
esquisses et dessins ; des sculptures.
D'autres objets témoignent de
cultures, croyances et rites ancestraux. Ainsi des masques, pagnes,
statues, lances, couteaux, portes d'entrée de villages…
Certains de ces objets apportent
même quelques précisions intéressantes sur leur propriétaire.
S'agissant des lances par exemple, celles non pourvues de trou (au
niveau du fer emmanché) indiquent qu'elles appartiennent à un
célibataire ; un trou signifie en revanche que l'homme a une
épouse (deux s'il y a deux trous sur la même « ligne »).
Et si l'homme a un enfant avec une épouse, un autre trou plus petit
est visible au-dessus du plus grand…
Quant aux fétiches, également très
bien représentés dans les collections, on en trouve de différentes
tailles. Certains parmi les plus petits semblent plus « spécialisés »
ou appropriés dans la lutte contre tel mal (ex :
l'infertilité).
Les plus grands (jusqu'à 1,60 m)
peuvent être plus impressionnants. Si la taille y est pour beaucoup,
la parure de la statue intimide aussi ! Voyez plutôt :
têtes de mort, gris-gris divers, grosses chaînes et clous en
pagaille. Le fétiche n'invite pas à l'accolade !
Et pourtant, contrairement aux
apparences, il nous veut du bien (si si). Ce fétiche à clous
(encore appelé nkisi du Kongo) est là pour nous servir. Un problème
de santé, des soucis de fertilité, un conflit avec un tiers ?
Il suffit d'en parler au féticheur qui, en spécialiste, activera
les pouvoirs magiques de la statue. Grâce à des clous enfoncés
dans le fétiche et l'incantation de formules (magiques) adaptées,
votre vœu devrait finir par être exaucé. Et si cela tardait, ne
pas hésiter à « enfoncer le clou », en l'occurrence
revenir auprès du féticheur pour renouveler l'opération (clous et
incantations).
La visite commentée du Musée
Galerie s'est terminée sur le toit terrasse, en compagnie de nos
hôtes (dont un artiste peintre de l'école de Poto-Poto, objet de la
prochaine visite). Baignée de soleil mais exposée à une chaleur
accablante, la terrasse offre une belle vue sur les alentours.
Elle permet également de s'asseoir
sur des fauteuils ou banquettes très confortables, à l'ombre; et
d'admirer encore quelques œuvres picturales.
Enfin, impossible de quitter les
lieux sans la lecture d'une phrase pleine de sagesse… et de bon
sens !
Puisqu'il était question d'art,
poursuivons jusqu'à la fameuse École
de peinture de Poto-Poto, située dans l'un des quartiers les plus
populaires de Brazzaville.
Si le bâtiment, qui accueille des
artistes comme des élèves et expose leurs œuvres, n'a rien
d'extraordinaire sur le plan architectural (une simple case-atelier),
il mérite néanmoins qu'on s'y arrête.
L'édifice comprend une grande salle
et une plus petite, toutes deux donnant à voir des toiles diverses.
Certaines ornent également l'intérieur des portes d'accès.
Dans le prolongement de ces salles,
un espace (non fermé) exposant d'autres œuvres, souvent de grande
taille.
Puis, tout autour du bâtiment, sous la toiture qui tombe
très bas, on observe des chevalets avec ou sans toile, des petites
tables de travail avec ou sans matériel de peinture ; et au
pied de certaines colonnes, des palettes de peintre.
L'École
de peinture (initialement atelier) de Poto-Poto a été créée en
1951 à l'initiative du Français Pierre Lods. Le but est de donner
libre cours à la création artistique, en mettant à disposition des
élèves papier, pinceaux, gouache…
Le
mouvement, la vie, la
tradition africaine et les couleurs vives
caractérisent le style de Poto-Poto. Parmi
les artistes réputés appartenant à cette école, citons Félix
Ossali, Nicolas Ondongo et
Jacques Zigoma
(une de ses œuvres ci-dessous: huile sur toile
sans titre datant de 1970).
Mais de nouveaux talents émergent,
comme Léticia Crolle Mahoungou.
Les œuvres d'artistes issus de
l'école sont facilement identifiables, étant signées de trois P :
PPP (peintre de Poto-Poto).